L'Euro est-il un boulet ?

Publié le par Enoch


A qui l'euro profite-t-il? Pas aux pays du centre de l'Europe, handicapés par la surévaluation de l'euro et des taux d'intérêt trop élevés. Pas aux pays périphériques, plongés dans la crise après une croissance artificiellement gonflée par des taux trop bas. Mais à qui l'euro profite-t-il? Selon Laurent Pinsolle, pas aux Européens apparemment.


Flickr - vizzzual - cc C’est un débat que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, mais au début des années 90, il y avait un débat important sur ce que devait être alors l’ECU, monnaie unique ou monnaie commune ? Devant l’échec patent de la monnaie unique, c’est un débat à réactiver.

Pour un premier groupe de pays, le moins que l’on puisse dire est que l’euro a pénalisé la croissance, à mille lieues des promesses de lendemains qui chantent de la campagne pour le traité de Maastricht. Ce premier groupe comprend notamment l’Allemagne, la France et l’Italie. Il pourra paraître curieux d’associer l’Allemagne, championne des exportations, mais il y a points communs.
En effet, ce premier groupe se caractérise par une faible croissance depuis dix ans. Plus de 2% de croissance annuelle est désormais un bon résultat pour ces pays. Il faut dire que la politique monétaire suivie par la BCE était inutilement restrictive pour des pays à faible croissance et faible inflation. Et depuis quelques années, leurs exportations en dehors de l’Union Européenne sont pénalisées par la surévaluation de l’euro : les économistes estiment son cours normal entre 1,05 et 1,1 dollar.

Pire, ce groupe est handicapé par la politique économique de l’Allemagne, première puissance économique de la zone euro. Au milieu des années 90, craignant pour sa compétitivité, notre voisin d’outre Rhin a choisi de délibérément  comprimer ses salaires, ce qui a déprimé sa demande intérieure et a donc pénalisé les exportations de ses voisins européens. En outre, la crise a bien montré que l’euro ne nous protégeait de rien puisque la zone euro est entrée en récession avant et plus fortement que les Etats-Unis.

L’euro, facteur de déséquilibres économiques
Mais si l’euro a été un boulet pour la croissance des trois premières économies de l’Europe continentale, la monnaie unique s’est également révélée désastreuse pour les économies de la périphérie de la zone. Dans un premier temps, on a pu croire que l’euro était un vrai plus. En effet, la convergence des taux longs vers les taux allemands a considérablement allégé le poids de la dette de ces pays. Mais cette convergence a pris fin en 2008.
Pire, la politique monétaire unique de la Banque Centrale Européenne ne s’est pas révélée plus appropriée à l’Irlande ou l’Espagne qu’à la France ou l’Allemagne. Au milieu des années 2000, les taux courts, à 4%, étaient trop élevés pour le couple franco-allemand, puisqu’ils correspondaient à la croissance nominale du PIB. En revanche, pour des pays comme l’Espagne, où la croissance nominale du PIB avoisinait les 7% ou l’Irlande, où elle était proche de 10%, les taux étaient beaucoup trop faibles.

Résultat, la monnaie unique y a provoqué une immense bulle financière et immobilière. L’effondrement économique actuel de ces pays montre bien que la croissance du passé était parfaitement artificielle et ne reposait sur aucun fondement solide. Pire, la récession qu’ils traversent rappelle la dépression des années 30 sans qu’ils puissent s’en échapper en dévaluant.
Quelque soit l’angle que l’on choisisse, quelque soit le pays que l’on prenne, il est désormais impossible de soutenir que la monnaie unique a apporté un quelconque bonus économique à l’Union Européenne. Il est grand temps de penser à une issue de secours…

Publié dans politique

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